Violaine est une jeune femme discrète, née en 1881 parmi le peuple, qui a grandi avec son père, sa mère et sa grande sœur. Sa sœur avait un chat, qui menait la vie dure à la pauvre Violaine, lui griffant les mollets sans cesse, ou la tourmentant de toutes autres manières. Un jour où il était en chaleur, il miaula durant la journée entière, puis la nuit qui suivit, puis la journée suivante. Violaine trouvait ce nuisible insupportable, et chaque miaulement qu'il émettait lui semblait fendiller son crâne. Après lui avoir jeté toutes sortes de choses pour qu'il se taise, sans succès, elle lui lança, excédée, une dernière chose qui lui tomba sous la main, le petit canif offert par son père. Le chat émit un miaulement rauque, puis se tut.
Réjouie du succès de son acte, la fillette se leva et alla voir le chat. Ce qu'elle vit la désarçonna : certes le chat s'était tu, mais une grande flaque rouge s’étendait autour de lui. Horrifiée par cette souillure grandissante, la petite alla chercher le ballai-brosse et le seau, et nettoya la flaque. Puis elle remit les poils du chat en place, sans que la coupure ne soit visible, retira le couteau et plaça le chat dans le jardin comme s'il s'était endormi. Il fut découvert par sa sœur quelques heures plus tard, qui pleura beaucoup, mais ni elle ni ses parents ne soupçonnèrent qu'il ait pu mourir d'autre chose que de vieillesse. Violaine apprit donc de cette expérience que si tout est nettoyé et remis en place, on ne peut ni être soupçonné ni être puni, et le problème est résolu facilement.
En grandissant, elle se découvrit une passion pour les travaux minutieux, et devint couturière. Elle travaillait donc parmi les couturières et les dentelières de Paris, dans un petit local, mais rebutée par la puanteur des égouts juste à côté, elle chercha à en changer. En 1898, suite à une opportunité offerte par l'une des ses collègues, elle partit à Londres. Le voyage se fit dans de mauvaises conditions, son petit salaire de couturière n'ayant pu lui offrir qu'une place mal choisie, elle se retrouva forcée de cohabiter avec les pires porcs de Paris : deux hommes, grossiers, mal accoutrés, empestant l'alcool à plein nez et riant sans cesse d'un rire gras, comme les taches de graisse qui ornaient leurs vêtements. Fort mystérieusement mais à son grand avantage, les deux hommes subirent un sort funeste durant la traversée : l'un passa par dessus bord, sans doute en ayant trébuché dans un cordage, tandis que l'autre eut une altercation malheureuse avec un possesseur de couteau, un cuisinier certainement, qui n'aurait pas apprécié que l'on tourne trop près de sa cuisine.
A Londres depuis maintenant 5 ans, Violaine a pu exercer son métier sans trop de dérangement. Ses clients sont des gens raffinés et elle prend plaisir à les recevoir, SURTOUT lorsqu'ils sont d'une propreté irréprochable... Si l'un d'eux a le malheur de se pointer dans sa boutique, portant une odeur de cigarette ou oubliant de s'essuyer les pieds, Violaine estime qu'elle a le devoir de débarrasser le monde de cette abomination, et qu'il ne s'en portera que mieux. Utilisant l'une de ses aiguilles afin de supprimer l'individu, elle a pour habitude de rhabiller le défunt, de le parfumer à outrance et de lui donner l'aspect qu'il AURAIT DU avoir selon elle.